L'assurance émeute est un volet complexe du droit des assurances en France. Bien que non couverts par défaut, les dommages liés aux émeutes peuvent faire l'objet d'une protection spécifique via des garanties adaptées. Cette question est devenue centrale en 2023 avec des sinistres qui ont touché de nombreux assurés.

A retenirEn 2023, les assureurs ont indemnisé 793 millions d'euros de dommages liés aux émeutes pour 16 400 sinistres déclarés.

Le cadre juridique de l'assurance émeute

Le cadre juridique de l'assurance émeute

Le droit des assurances encadre strictement la couverture des dommages causés lors d'émeutes et mouvements populaires. La législation établit un régime d'exclusion par défaut, tout en laissant aux assureurs la possibilité de proposer des garanties spécifiques.

Un cadre légal basé sur l'exclusion

L'article L.121-8 du Code des assurances stipule que l'assureur ne répond pas, sauf convention contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires. Cette disposition constitue le fondement juridique du régime d'exclusion des dommages liés aux émeutes.

Néanmoins, cette exclusion n'étant pas d'ordre public, les parties au contrat d'assurance peuvent décider d'y déroger par une clause expresse. Les assureurs gardent ainsi la faculté d'inclure la garantie émeutes dans leurs contrats moyennant une tarification adaptée.

Une notion juridique aux contours flous

Le droit français ne fournit pas de définition légale précise de l'émeute. Cette absence de cadre strict génère des difficultés d'interprétation pour les assureurs comme pour les assurés. La jurisprudence a dégagé trois critères cumulatifs permettant de qualifier une émeute :

  • Un critère de masse : rassemblement d'un nombre conséquent de personnes
  • Un critère contestataire : opposition à l'autorité établie
  • Un critère revendicatif : expression de revendications sociales ou politiques

La charge de la preuve

En cas de litige sur la qualification d'émeute, la charge de la preuve pèse sur l'assureur qui invoque l'exclusion. Il doit démontrer que les dommages résultent directement d'une émeute au sens des critères jurisprudentiels. Cette obligation probatoire constitue une protection pour les assurés face aux refus de garantie.

Les garanties proposées par les assureurs

Les garanties proposées par les assureurs

Les garanties proposées par les assureurs

Face aux dégâts causés par les émeutes de l'été 2023, les assureurs ont déployé des mesures exceptionnelles pour accompagner leurs assurés. Selon France Assureurs, les dommages indemnisés s'élèvent à 793 millions d'euros pour 16 400 sinistres déclarés.

Les garanties de base de l'assurance habitation

Les contrats d'assurance habitation multirisques proposent différentes garanties mobilisables en cas d'émeutes. La garantie incendie couvre les dommages causés par les flammes, les explosions et la fumée. La garantie bris de glace prend en charge le remplacement des vitres, fenêtres et baies vitrées endommagées. La garantie vol et vandalisme intervient pour les pillages et dégradations.

L'extension de garantie émeute

Les assureurs ont mis en place des dispositifs exceptionnels. Axa France a étendu sa garantie émeute à tous ses assurés professionnels détenteurs d'une protection bris de glace, avec une franchise unique quel que soit le nombre de sinistres. D'autres compagnies comme la Macif ou Generali ont également adapté leurs contrats pour mieux protéger leurs assurés.

Les plafonds d'indemnisation

Type de dommagePlafond moyen
IncendieValeur de reconstruction
Bris de glace5 000 à 10 000 €
Vol/vandalisme15 000 à 30 000 €

Les mesures d'accompagnement

Les assureurs ont prolongé le délai de déclaration des sinistres à 30 jours au lieu des 5 jours habituels. Ils ont également simplifié les procédures d'indemnisation et mis en place des cellules de crise dédiées au traitement accéléré des dossiers liés aux émeutes.

"Les assureurs se mobilisent pour accompagner leurs assurés dans ces moments difficiles" Florence Lustman, présidente de France Assureurs
Les démarches pour être indemnisé

Les démarches pour être indemnisé

Les démarches pour être indemnisé

En France, les démarches d'indemnisation suite aux dommages causés par des émeutes suivent une procédure stricte qui nécessite rigueur et documentation précise. Les assurés doivent respecter plusieurs étapes administratives pour obtenir la prise en charge des préjudices subis.

La procédure de déclaration des dommages

La première obligation consiste à déposer une plainte auprès des services de police ou de gendarmerie. Cette démarche constitue un prérequis indispensable à toute demande d'indemnisation. La déclaration de sinistre doit ensuite être transmise à l'assureur dans un délai de 5 jours ouvrés suivant la constatation des dégâts. En cas de vol, ce délai est réduit à 2 jours ouvrés.

Documents justificatifs requis

  • Procès-verbal du dépôt de plainte
  • Photos détaillées des dommages
  • Factures originales des biens endommagés
  • Devis de réparation ou de remplacement
  • Attestation d'assurance en cours de validité

Le rôle de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infraction

La CIVI peut intervenir en complément de l'assurance lorsque les dommages dépassent certains seuils. Pour les dégâts matériels, le préjudice doit être supérieur à 4 500 euros. La demande auprès de la CIVI doit être déposée dans les 3 ans suivant les faits au tribunal judiciaire du lieu de résidence.

Expertise et évaluation

Un expert mandaté par l'assurance évalue l'étendue des dommages. L'assuré peut se faire assister d'un expert d'assuré indépendant. L'indemnisation est calculée sur la base de la valeur de remplacement des biens, déduction faite de la vétusté et de la franchise contractuelle.

"La documentation photographique des dommages dès leur constatation est fondamentale pour faciliter l'instruction du dossier" Florence Lustman, présidente de France Assureurs
Les limites et exclusions de garantie

Les limites et exclusions de garantie

Les limites et exclusions de garantie

Les assurances habitation comportent des limitations et exclusions concernant la couverture des dommages liés aux émeutes, qu'il est indispensable de connaître pour éviter les mauvaises surprises. L'article L.121-8 du Code des assurances établit une présomption d'exclusion légale pour ce type de sinistres.

Les exclusions légales et conventionnelles

Les dommages résultant de certains événements sont systématiquement exclus des garanties d'assurance habitation :

  • Les dommages causés par une guerre civile ou étrangère
  • Les actes de terrorisme non couverts par le Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI)
  • Les mouvements populaires et émeutes, sauf convention contraire explicite dans le contrat

Les plafonds et franchises

Les contrats prévoient généralement des limites d'indemnisation et des franchises spécifiques pour les sinistres liés aux émeutes :

Type de dommagePlafond moyenFranchise
Dégâts matériels150 000 €10% du montant des dommages
Pertes d'exploitation100 000 €3 jours ouvrés

Le durcissement des conditions dans les zones sensibles

France Assureurs constate une tendance au durcissement des conditions d'assurance dans les territoires exposés aux troubles. À Mayotte, moins de 10% des habitations sont assurées en raison des restrictions imposées par les assureurs. Les compagnies exigent désormais des mesures de protection renforcées : vidéosurveillance, rideaux métalliques, alarmes connectées.

La responsabilité de l'État

En cas de dommages causés lors d'attroupements ou rassemblements, l'État peut voir sa responsabilité engagée au titre de l'article L.211-10 du Code de la sécurité intérieure. Cette disposition permet aux victimes non assurées ou insuffisamment couvertes d'obtenir réparation.

L'essentiel à retenir sur l'assurance émeute

L'essentiel à retenir sur l'assurance émeute

Les évolutions récentes montrent une adaptation des assureurs aux nouveaux risques d'émeutes, avec des délais de déclaration allongés et des procédures simplifiées. Cependant, les zones à risque font l'objet de conditions plus strictes et la couverture reste inégale sur le territoire, comme à Mayotte où moins de 10% des habitations sont assurées. Une meilleure protection nécessitera un équilibre entre accessibilité des garanties et gestion des risques.